Ou pas…
Notre expérience un peu ratée de l’ascension du Cotopaxi en Equateur n’aura fait que renforcer notre volonté de gravir les plus hautes et enneigées montagnes d’Amérique Latine.
Avec ou sans yeux, la cordillère blanche, avec ses 50 pics enneigés au delà de 5500m et ses innombrables glaciers est un terrain de choix pour assouvir nos désirs les plus fous.
Après un bref passage par Trujillo au bord de l’océan pacifique pour contempler les ruines pré-incas de la civilisation Chimu (qui avait inventé le Verlan : ils parlaient le Muchi !)…
…nous voilà arrivés à Huaraz, la “chamonix des Andes”, pour dénicher le guide de nos rêves et choisir 2 sommets à gravir.
Notre objectif est le suivant : faire mieux que le Cotopaxi, commencer par un sommet à plus de 5500m de difficulté moyenne pour ensuite gravir une montagne de plus de 6000m avec un niveau technique plus élevé (mur à 75° et utilisation de deux piolets pour l’escalade).
Après une première tournée des popottes, les prix demandés par les agences sont tellement élevés que nous pensons passer notre chemin… lorsque celui-ci croise la route d’un guide indépendant (avec la carte de guide agréé et tout ce qui va bien) qui a su s’adapter à notre budget en raclant un peu sur le confort… à bas les cuisiniers, porteurs, refuges et mules… à nous sacs de 15kg sur les épaules, tentes quechua et riz quotidien (avec quelques barres de chocolat, faut pas déconner non plus!!).
Notre programme est alors établi :
1er Pic : Le Pisco à 5752m, qui offre un panorama idéal sur une bonne moitié de la cordillère blanche, pour s’acclimater et se chauffer un peu les jambes.
2eme Pic : Le Chopicalqui, qui du haut de ses 6354m, nous semble imprenable vu de loin. Mais là est tout le défi!!
Nous sommes exités comme des puces à l’idée de rechausser les crampons et les piolets et d’aller chevaucher crevasses et glaciers. Seul inconnu pour changer : le temps… qui est fort maussade depuis que nous sommes arrivés. Pluie, neige, nuages noirs. Tout y passe. Mais il parait que l’influence de la lune est bonne en cette période et les anciens du pueblo nous assurent que le temps va changer.
Départ donc de Huaraz à 6h du matin en bus, pour rejoindre le sentier qui mène au refuge à 4600m, point de départ de l’ascension. Le guide nous rappelle pendant le trajet que le refuge étant à 25$ par personne, nous nous contenterons de la tente… à moins que les gérants Italiens ne soient pas là.
Les 2 heures de trajet sont également propices à quelques confidences de la part de notre guide : “Vous savez, depuis le début de la saison cette année, il y a déjà eu 8 morts… Mais je vous rassure, aucun n’avait de guide. D’ailleurs l’année dernière on a retrouvé dans un glacier le corps intact d’un Japonais qui avait disparu il y a 20 ans. Et en Juin dernier un ami à moi a vu une tâche noire dans la neige. C’était le corps d’un Allemand…” Ambiance!
Enfin bref, il en faudra plus pour nous décourager. Nous sommes avec un guide donc tout va bien!
Au départ du chemin nous croisons des mules qui attendent les touristes pour porter leurs lours équipements jusqu’au refuge. Ca a l’air bien une mule. Solide sur ses jambes, habituée à l’altitude… Mais bon, trop cher ! Du coup les mules ce sera nous pour le coup !
Avec nos sacs géants sur le dos (mais qui a eu l’idée de faire des tentes aussi lourdes ????) nous parcourons, non sans mal, et sous une mince bruine, les 5km et 1000m de dénivelé qui nous conduisent au refuge. Bonne nouvelle, le gérant n’est pas là, nous pourrons dormir dans des lits à l’oeil!
Le temps est exécrable, mais semble s’améliorer avec le coucher du soleil. Nous ne pouvons pas voir notre pic, mais les glaciers nous entourent et notre deuxième objectif, le Chopicalqui, se dessine dans la lumière razante!
Une platrée de riz, un thé de feuilles de coca (c’est légal ici, bon pour l’altitude… et énergisant) et au lit à 18h… C’est pas tout ça, mais notre ascension de 7h commencera à minuit… il ne faut donc pas tarder!
Le réveil sonne, le guide sort et revient en soufflant “Pffff… très nuageux, je ne pense pas qu’on puisse arriver au sommet… enfin on va voir”.
30 minutes plus tard, emmitouflés, nous voilà dehors… et là sous nos yeux ébahis, plus un seul nuage. Des milliards d’étoiles, une joli croissant de Lune!! YOUHOUOUOUOUOUOU, la chance tourne!
La procession des lumières reprend son cours. Nous sommes seuls, tous les trois, à nous diriger tête basse vers le glacier. 2h de marche dans la rocaille avant de chausser les crampons, nous encorder et commencer à attaquer la neige…
BRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR……… un bruit énorme déchire le silence de la nuit. Un orage alors que le temps est au beau fixe ??? “Ce n’est rien, dixit le guide, c’est une avalanche. On va en entendre des dizaines. Mais ne vous inquiétez pas ce n’est jamais sur le versant que l’on monte…” Ouf… nous voilà rassurés.
Le temps est plutôt agréable. Pas de vent (ça change), pas de neige (ça change) et même pas froid!!! Ca monde modérément. La neige des nuits précédentes a recouvert les crevasses et caché la route. Nous marchons donc sur un glacier vierge de toute trace, le guide donnant des coups de batons devant ses pieds pour dénicher les crevasses (il connait exactement leur emplacement).
Nous sautons quelques failles, passons à flanc de falaise, écoutons les avalanches au loin. La marche est soutenue mais faisable.
Nous arrivons à la première vraie difficulté : un mur à 65° recouvert de neige fraiche, empéchant les piolets et les crampons de se planter dans la glace. De plus le guide cherche deux crevasses au début du mur qu’il n’arrive pas à trouver. “Il va falloir faire demi-tour chicos. Avec la neige fraiche, les piolets n’accrochent pas et je ne trouve pas les crevasses”.
Nous commencons à désespérer de notre mauvaise étoile, lorsque le guide déniche enfin les failles, les ouvre au grand jour et commence l’ascension du mur en émiettant la neige pour faire apparaitre la glace.
Arrivé en haut, il nous assure pour qu’à notre tour nous commencions l’escalade. C’est plutôt plus facile que prévu. Les 70m du mur sont éprouvants, mais le piolet et les crampons sont des armes redoutables dans la glace.
Arrivés au haut de ce mur, le soleil commence à percer. Nous sommes à 1h30 du sommet et le vue est à couper le souffle. Nous découvrons le paysage qui nous entoure. Le ciel prend toutes les couleurs possibles et imaginables, les stalactiques nous entourent, et au derrière nous, nous pouvons voir nos traces dans la neige vierge.
Le guide nous presse un peu : “Il faut que nous soyons au sommet dans 1h30 max, sinon la descente sera difficile avec la neige collante”. Nous marchons donc à 5500m dans une neige fraiche qui rend la progression difficile. Même le guide doit s’arrêter tous les 100m pour reprendre son souffle. Nous arrivons alors au pied du dernier mur qui nous mènera à 5752m. Le guide ouvre la voie. Nous le suivons, passons la dernière crevasse et nous voilà sur le toit de notre monde!
La vue est atomique. Les sommets sont innombrables, le ciel est totalement dégagé, d’un bleu surpuissant…
nous contemplons pendant 20minutes avec en prime une vue magique sur l’Artesonraju, le pic qui a inspiré le logo de la “Paramount”!
La descente se fait sans soucis, nous redescendons le premier mur en rappel et revenons les yeux plein d’étoiles au refuge à 12h… nous sommes bien crevés lorsque le guide nous annonce : “Bon on se repose 1h et on va au camp de base numéro 1 pour préparer l’ascension du Chopicalqui”.
ARFFFF ! Coup dur… 1H de repos ???? Pour remarcher pendant 3h ???? Ben oui… majoritairement de la descente mais tout de même, la motivation en prend un coup. On veut dormir nous!
Nous arrivons tout de même au camp de base où nous dormirons de 16h à 8h du mat quasiment sans interruption.
Le lendemain nous reprenons nos lourds sacs (des nouveaux équipements, comme un second piolet technique, sont arrivés entre temps) pour atteindre le camp moreno à la lisière du glacier à 5100m.
Le programme est simple : Le lendemain nous atteindrons le camps haut à 5500m où nous camperons sur le glacier pour effectuer l’ascencion de nuit et tutoyer la lune à 6354m.
La vue sur le Chopicalqui est fascinante et un peu inquiétante. Il parait totalement imprenable. Il siège a coté de l’imposant Huascaran, plus haute montagne de la corillère à 6700m. AU loin nous pouvons observer les innombrables avalanches dans le glacier.
Il neigera toute la nuit. Mais dans cette cordillère il y a des miracles. Au réveil, le ciel est totalement bleu, le soleil est intense… WAHOUUU!! Quelle chance nous avons. Lorsque le guide de nous dire : “Avec ce temps, je pense que parler de sommet est illusoire. Vous voulez tout de même qu’on tente d’aller au camp haut ?”
Laure et moi nous jetons un regard d’ahuri!!! Euhhhh c’est quoi le problème avec le temps là ?????????????? Nous n’avons jamais eu un temps aussi parfait depuis 2 mois !
L’explication serait la suivante : La neige de la nuit aurait recouvert les innombrables crevasses rendant l’ascension trop dangereuse. De plus la technicité de ce pic est plus importante et 3 murs à 75° nous attendent. Avec la neige il semble impossible de pouvoir y planter nos crampons et piolets.
De notre coté, même si le sommet n’est pas réalisable, nous voulons camper dans le glacier et aller le plus loin possible. Le guide fait la moue mais nous prenons tout de même le départ.
Au pied du glacier à 5400m, le guide nous regarde et nous indique que les crevasses sont invisibles et que la route est trop dangereuse.
La mort dans l’âme, nous devons faire demi tour, non sans jeter un coup d’oeil bien triste à ce ciel d’un bleu parfait. Les conditions nous semblaient tellement parfaites…
Pour faire passer la pillule, le guide nous propose de faire un autre pic à 5700m, le Vallunaraju, plus facile que notre première ascension. On regresse, nous tirons la gueule, mais acceptons tout de même, histoire d’avoir un nouveau point de vue et le plaisir de marcher de nouveau crampons aux pieds dans la glace.
En attendant, un jour de repos bien mérité, et le temps d’écrire cet article!!
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C’est pas un peu dangereux tout ca lol ?
On pourrait avoir des vidéos ?
On se répète, article après article : très belles photos, émotions fortes qu’on vit avec vous (avec un décalage quand même, heureusement pour nous)et admiration devant votre ténacité et votre courage.
Soyez prudents quand même, les avalanches et les crevasses, c’est pas pour rire !
Bises à tousles deux.
Nous venons de regarder les photos de votre dernière ascension. Enfin, vous semblez avoir vaincu la “Cumbre del Vallunaraju”. Les photos sont splendides. Vous devez être rassasiés de votre boulimie d’escalade ? Vous allez peut-être,maintenant, vous consacrer à un tourisme plus classique ou rechercher, par exemple, le trésor des Incas de l’empereur Atahualpa.
Bon courage … et bises.
Je suis impressionnée par ces montagnes et par votre courage … Maintenant, je peux suivre vos aventures plus souvent mais je ne vous envie pas, je préfère rester dans mes petites montagnes vosgiennes.
Bon courage pour la suite de vos aventures.
Bisous.
Oui oui il y a des videos, mais les vitesses de connexion ne nous permettent pas de vraiment les mettre en ligne. On attend notre retour pour faire un film recapitulatif
Sinon pour le cote dangereux, c est bien tout l interet d y aller avec un guide. Il sait ou sont les crevasses, connait les risques d avalanche et prend les decisions de GO ou NO GO (en nous frustrant quand il a refuse de faire le pic a 6300 alors que pour nous le temps semblait parfait… pauvres novices que nous sommes.)
Effectivement maintenant nous revenons sur des itineraires plus classiques bien qu on ait bien quelques idees pour faire le Macchu Pichu autrement…
Sinon c est sur que du haut de leur 1400m les vosges ont moins de sommets enneiges. Mais bon il en faut pour tout le monde!
Coucou,
Je reprends le fil de vos aventures
Là, je dis : chapeau bas !!!!! parce que c’est très courageux et un peu risqué qd même hein….
!!!!
Bon là, je vois 2 photos magnifiques pour notre concours photos annuel (cf le mail que je t’ai envoyé ce matin) : celle avec le soleil qui se relète dans la cime enneigée (format vertical) et celle avec les pics de glace (format vertical aussi) : elles sont magnifiques
Des bizzzzz à vous deux
cathy
Bon je vais tacher de te les envoyer alors
SI je gagne le concours on se partagera le filet garni