Vendredi 22. Nous entammons seuls l’ascension du Gunung Tujuh, qui doit nous mener tout droit au lac des sept montagnes. A l’hotel, notre hôte nous a dit que nous pouvions y aller sans guide. Et effectivement, on ne peut pas se perdre. Le chemin n’est pas exactement balisé, mais pour trouver la route, une seule technique : suivez les détritus. En pleine jungle, nous faisons comme le petit poucet : nous suivons les papiers fosforescents de bonbons et autres amballages de nouilles. Très efficace.
Nous arrivons donc en haut sans peine, après tout de même près de trois heures de montée ininterrompue sur un chemin abrupte. Cyril n’est pas un adepte des pauses. Plus vite en haut, plus vite à la vue époustouflante. Et effectivement, une fois au sommet, nous avons le souffle coupé : voilà ce que nous contemplons :
Si vous n’y voyez rien, ne vous inquiettez pas, ce n’est pas un problème de résolution d’image. En plein brouillard, impossible d’y voir à 15 m. Après avoir attendu en vain que le ciel se dégage sous une pluie battante, nous avons renoncé et avons rebroussé chemin, patauds.
De retour à l’hotel, nous voyons une photo du lac Tujuh : c’est magnifique, un vrai lac de cratère perdu entre sept sommets montagneux. Ca vaut le détour (enfin, par temps clair).
Tant pis, nous aurons une seconde chance avec le Gunung Kerinci : le plus haut volcan d’Indonésie, culminant à 3800 m (Pour le détail de l’itinéraire, cliquez ici). Nous partons de Kersik Tua, à 1500 m d’altitude, à 9h du matin avec Pany, notre guide. Il porte la tente et le matériel de camping, Cyril des vêtements de rechange et de la nourriture, et moi, le gros du matos, l’eau et la lampe frontale.
Le début de la ballade est sympathique, nous avançons légers (enfin certains plus que d’autres). On nous avait prévenus que ce serait difficile ; je ris dans ma barbe. Pf, de la gnognotte ! Nous nous enfonçons dans la jungle, croisons des écureils (ok, on fait mieux comme animal sauvage, mais nous aurions aussi pu voir des tigres, alors… !), des singes à poils jaune… Notre guide nous fait faire des pauses toutes les 30 minutes. Cyril courerait bien jusqu’au sommet sans s’arrêter (plus vite en haute, plus vite… etc.), mais moi je suis d’accord pour ménager notre guide, tout de même !
Nous déjeunons au shelter 2 : confit de poulet, omelette, riz. De quoi reprendre des forces. Puis c’est reparti. Là, je commence à comprendre les mises en garde concernant le niveau de la “ballade”. Nous empreintons des chemins étriqués, où nous devons nous faufiler dans des crevasses qui laissent à peine la place de mettre un pied devant l’autre. Nous devons nous baisser pour passer sous la végétation, nous hisser à la force des poignets, escalader des rochers et nous appuyer sur les racines des arbres. Cyril a parfaitement compris la techique du camoufflage : parti avec un pantalon beige et un t-shirt blanc, il ressort de là marron de la tête aux pieds. Idéal pour l’observation des oiseaux (enfin on commence surtout à attirer les mouches).Les pauses se font plus fréquentes (bizarrement ce n’est plus le guide qui les propose). La dernière partie est la plus difficile.
Finalement nous atteignons le shelter 3 vers 17h, juste à temps pour monter la tente avant la tombée de la nuit. A cette altitude (3300), la seule végétation qui pousse encore est composée de buissons. Nous avons vue sur la vallée…
Un orage éclate. Nous nous réfugions dans la tente. Dommage qu’elle ne soit pas étanche et que la toile “imperméable” n’arrive qu’à mi-hauteur. Par tempête, c’est assez peu pratique. Nous sommes donc rapidement humides et frissonants. A cela, il faut rajouter une effroyable odeur de pieds. Au bout d’un moment Cyril accepte de sacrifier son confort au bien être de tous et retire ses chaussettes. Ouf (quand même, il n’y aurait que moi, mais vis à vis du guide ça ne le fait pas). Sauf que l’odeur persiste. Nous finissons par en trouver l’origine, qui se situe sous mes chevilles. Zut, je ne me serais pas crue capable d’une telle performance.
Nous passons une nuit sans sommeil (froid, humidité, odeur persistante et ronflement du guide).
Le réveil sonne à 4h. Un petit thé, des biscuits à la fraise, et nous reprenons l’ascension. Là, je dois dire que ça ne m’amuse pas du tout. J’ai froid, je suis fatiguée, ça grimpe raide et il n’y a aucune prise, nous gravissons une côte faite de lave effritée, dans le noir. Et puis les biscuits à la fraise ne passent pas. A ce moment là nous passons à côté de 4 tombes, tas de pierre en mémoire des morts du Kerinci, tombés dans le cratère ou morts de froid. C’est bon pour le moral. J’extériorise mes pensées : j’en ai marre, je ne comprends pas pourquoi on s’inflige ça, j’ai mal au coeur, je m’arrête là, je sais pas ce que j’ai fait dans une vie antérieure pour mériter ça, mais j’ai dû être une bad bad girl. Cyril me botte gentiment le derrière, et c’est reparti.
Nous arrivons au sommet à 6h15, juste à temps pour le lever du soleil. Et là : c’est magique ! Epoustouflant, à couper le souffle (pour de vrai cette fois), extraordinaire, c’est… beau quoi !!! Le cratère fait 300 m de profondeur, 400 m de diamètre. Du fond du gouffre remontent de lourds nuages de souffre (s’il n’avait pas plus, nous aurions pu voir des jets de feu, là nous retrouvons notre bonne vieille odeur d’oeuf pourri). Nous sommes sur la crète du volcan, assez mince pour nous donner le vertige. Cyril est à ce moment l’homme le plus haut de toute l’Indonésie !
Allez, en images, on ne fera pas mieux :
On a enfin notre Indonésie magique, des paysages inégalés… Ca méritait tous les calvaires du monde… Nous voyons même le lac Tujuh, somptueux.
Nous en prenons plein les yeux pendant deux heures, puis redescendons. En chemin, nous croisons un groupe de 4 jeunes indonésiens, qui tentent l’ascension en claquettes ! Et rebroussent chemin à une heure du sommet. Franchement, faut être con pour arriver si près du but et abandonner ! Enfin, certains n’ont pas de volonté (ou de Cyril).
La descente est presque aussi longue et dure que la montée. Il faut s’accrocher aux banches (ou aux fougères, même si Cyril est dubitatif quant à ma technique – pourtant je ne suis pas la première à dire que la fougère plie mais ne rompt point. Allez savoir pourquoi il met en cause mes sources littéraires). Nous croisons cette fois des blacks gibbons (aussi appelé singe rat de Sumatra par les connaisseurs). Cyril est mordu au bras. Nous devons y remédier. SINKAYA !
Mais à part cet incident nous arrivons à bon port, à 16h, complètement rincés. Subandi, notre hôte, nous fait chauffer de l’eau à la cheminer pour avoir le réconfort d’une douche chaude. Ah, les plaisirs simples de la vie !
Dodo à 20h, des belles images plein la tête…
PS : si vous passez par Kersik Tua, arrêtez vous chez Subandi Homestay, où nous avons été aux petits soins : pancakes à la banane et au chocolat le matin vu la gastronomie locale, c’est vraiment bysance), une dizaine de plats différents le soir, un massage pour Cyril par le maître de maison pour soigner les courbatures (même si lui ne le mettrait pas dans les avantages vu qu’il a eu un mal de chien mais a du jouer l’homme fort qui a même pas mal)…
L’itinéraire
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Grimpette kerinci sur une carte plus grande
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Cyril, tu m’as toujours dit que c’était à la recherche de la nouvelle star que tu voulais faire. Et là je vois que c’est plutôt un mix de Kho Lanta et de Pékin Express que tu fais!! Bravo à tous les deux pour votre courage ! Et merci pour les photos et les articles!
Bises
ha ha ha !!!!, J’adore les photos avant, pendant et après….: très explicites….
Les photos sont absolument magnifiques et cela valait vraiment la peine de manger des biscuits à la fraise et supporter des pieds qui puent…
Bise à vous deux !!!!
Splendides photos! Enfin si on excepte la 1ère avec cette vilaine casquette
Continuez à vivre et à nous faire partager ces belles (et parfois difficiles) expériences.
Profitez en bien!
Toujours très passionnant de suivre votre voyage à l’autre bout du monde. Profitez en pour nous.
Wonder women notre Laure….On ne dirait pas comme ca.Je continue de voyager grace à vous. Bisous
Je rajoute à ma liste de courses le désodorisant pour les pieds…
Pour Pékin Express, on n’est pas encore à 1€ par jour, mais on y travaille… et surtout on a eu besoin d’une semaine de repos après 2 jours d’effort (et le pire c’est que l’alcool le plus fort qu’on trouve ici est la bière
)!!
Guillaume, je ne vois pas de quelle vilaine casquette tu parles
Au fur et à mesure du récit, nous comprenons votre souffrance.. d’ailleurs, effectivement, ça se voit sur les photos (qui sont magnifiques).
Cyril, comment as-tu réussi à te faire mordre par un singe ? Fais attention la prochaine fois si tu te trouves face à un lion…
Par contre, je souhaiterai savoir ce que signifie “SINKAYA”, ce mot m’est totalement inconnu et je n’ai pas réussi à en connaître la signification.
Là, je commence à être vraiment jaloux…
Gilles, regarde a nouveau les photos de Jakarta si tu veux te sentir mieux !
Sinon Cyril ne sest pas fait reellement mordre par un singe, cetait une reference a Brain Dead ( et je precise que la reference cinematographique nest pas de moi, cest le film culte de Cyril, et comme ca se passe a Sumatra, il a presque ete decu de ne pas rellement rencontrer la sale bete !)