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Ignace, Ignace, c’est un joli petit nom charmant !

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Arrivée à Manakar le vendredi soir. Re les pousse pousses, qui s’arrachent, presque littéralement, les 2 vazahas pas encore sortis du taxi-brousse. Nous rejoingons le centre de Manakar. Sur le chemin, un homme à bicyclette, la soixantaine, chemise violette sur laquelle est écrit, en grosses lettres : « Ignace, LE guide de Manakar », s’pproche de Cyril et lui adresse la parole avec beaucoup de déférence : « excusez moi de vous déranger. Puis-je vous présenter mes services de guide ? » Ouaou, ça change de la méthode pousse-pousse. Vyril le laisse donc faire son introduction. Il nous accompagne jusqu’à l’hotel, et nous convenons de nous retrouver le soir pour de plus amples discussions sur l’expédition en pirogue sur le canal des Pangalanes le lendemain.

Après un petit tour dans la ville, une noix de coco fraiche sur la plage, une lessive illégale dans la salle de bain, nous retrouvons Ignace sur la terrasse de l’hotel. Avant de rentrer dans les détails de l’excursion, Ignace nous sort sa pochette de 45 feuillets plastifiés, à bien étudier : Ignace, c’est du sérieux, pas comme tous ces guides imposteurs. Lui est assermenté par l’état, il paie ses impôts, il est agréé ! Aucun papier ne manque : nous avons droit à sa licence, sa carte d’identité, son autorisation d’exercer, sa fiche d’imposition… Moi je jète un œil discret, un peu gênée. C’est bon Ignace, pas de souci, le t-shirt avait suffi à me convaincre de ton sérieux. Cyril simule la même indifférence à la paperasse administrative, mais en un coup d’œil avisé, il a vérifié que les numéros de licence et de fiche d’imposition coïncidaient bien. Les test est positif. Sherlock est en confiance. Nous pouvons donc parler des choses sérieuses : la ballade en pirogue. Ignace nous l’assure : avec lui, nous verrons TOUT. Les autres guides foncent sur le canal, négligent la plantation de vanille, la distillerie. Pas Ignace. Nous verrons des plantes carnivores, des villages de pêcheurs, le trou du commissaire. Rien n’échappe à Ignace. Deux autres français ont déjà signé. Nous demandons le prix. Mais c’est dans la pochette ! TOUT est dans la pochette. 40 000 Ar chacun, c’est écrit noir sur blanc, nous ne négocions pas. Pas bête, LE guide. Il nous demande ensuite ce que nous voulons manger le lendemain. « Comme vous voulez, ce qu’il y aura, on n’est pas compliqués. » Ce qui ne veut pas dire qu’on ne sait pas ce qu’on veut. « Plutôt poulet ou poisson ? – Poisson ! » Ca, c’est Cyril qui a battu le record du monde de la prise de décision (enfin, pour quelqu’un qui deux secondes avant disait « Comme vous voulez ! »). « grillé ou en sauce ? – Grillé ! ». Nouveau record. Le guide a l’air embêté. Visiblement, ce n’était pas la bonne réponse. La mer est très agitée, les pêcheurs ne sortent pas par un tel temps, on risque d’avoir du mal à trouver du poisson. C’est le comble pour une ballade dans des villages de pêcheurs. Mais ma foi, nous nous adapterons.

Avant de partir le lendemain matin, nous prenons le soi-disant « bon petit déjeuner » de l’hotel Les Flamboyants, en compagnie d’un couple, la soixantaine, qui voyage depuis deux mois à Mada, sac au dos. Pas frileux, les vieux : ils ont fait le trajet Morondova – Tuléar en pirogue,e t ont démâté à 15 km des côtes. La patate ! Je veux bien être comme eux à leur âge !

Nous sommes en retard pour le rendez-vous, Cyril a horreur de ça. Pour essayer de combler ce retard, nous prenons un pousse-pousse. Erreur stratégique : c’est plus lent qu’à pieds et la gars peine à tirer nos deux carcasses. Bref, nous arrivons quand même au point de départ. Ignace est là avec sa chemise violette, et nous rencontrons nos deux acolytes pour la journée : Julia et Maxime. Ils voyagent en 4*4, avec Jacques, leur chauffeur, et sont descendus à La Vanille, un hôtel un peu excentré, luxueux, au bord de la plage, où, selon notre guide, des touristes sont fréquemment attaqués à la machette par des bandits. Autant dire que les amoureux ne dormiront pas sur leurs deux oreilles ce soir ! Mais bon, c’est ça, un guide qui dit TOUT !

Nous montons en pirogue. Pas une pirogue de pêcheurs : un spéciale touristes, avec dossiers etombrelle. Ah ! On est choyés ! Et puis 4 pagayeurs rament pour nous, dont Ignace, 65 ans (c’était marqué sur sa carte d’identité, Cyril a bien noté).

Premier arrêt dans un  village de pêcheurs : un petit hâvre de paix, des huttes en terre, toutes simples, pléthore d’enfants qui nous saluent à coup de « Bonjour Vazahas » (comprendre « Bonjour Blanc », ce à quoi nous nous abstenons de répondre « Bonjour Noir »), nous font de magnifiques sourires, nous demande à être pris en photo… Adorables ! Et pour une fois, pas de « Bonbons Vazahas ! », « Stylos Vazahas ! », Donne mois de l’argent Vazahas ! ». Désintéressés, chaleureux… jusqu’à ce que Julia et Maxime sortent leurs paquets de bonbons. Là, tous les gamins se précipitent, s’agrippent à eux, essaient d’avoir leurs bonbons. Nous contemplons la scène, dépités, depuis la pirogue que nous avons regagnée, avec Ignace, atterré, qui nous dit que les gamins d’ici sont vraiment mal élevés. Julia et Maxime rejoignent finalement l’embarcation. Elle est confuse et désolée du « spectacle », elle ne s’attendait pas à cela. Elle dit aussi à Ignace qu’ils ont prévu stylos et cahiers, à donner au chef du village. Il décommande : le chef vendra tout et gardera l’argent pour lui. Au temps pour la générosité !

Nous poursuivons donc sur la rivière, avec un nouveau passager à bord : Georgette, la poule. Elle est toute sage, en tête de pirogue, sans se douter que si on ne trouve pas de poisson, elle va y passer ! Pauvrette !

Nous nous arrêtons au mémorial de la révolte de mars 1947, quand un parti indépendantiste malgache s’est soulevé contre le colon français, pour être finalement écrasé après six mois de quasi guerre civile. Ignace nous désigne d’autres pirogues de touristes : eux ne s’arrêtent pas, alors que nous, on voit TOUT !

Nouveau village de pêcheurs. Toujours pas de poisson. Georgette, fuis ! Même ambiance paisible. Super guide nous explique les pierres sacrées, les sacrifices de zébus, les croyances…

Puis visite de la distillerie d’huiles essentielles, celles qui soignent tout, du simple rhume aux peaux sclérosées. Les outils sont rudimentaires : trois cuves totalement rouillées au milieu de nulle part. Mais cela fonctionne. Direction la plantation de vanille. Enfin, ex-plantation. Tenue par un chinois, l’exploitation a été pillée deux ans plus tôt par des voyous qui avaient saoulé le gardien ! Le chinois s’est vexé, il a tout laissé à l’abandon. Du gâchis.

Nous reprenons la pirogue. Mais où est Georgette ? Glups, l y a un poulet plumé dans une bassine. Pas de poisson ! Voilà qui sonne le glas de la poulette !

Nous atteignons le canal des « Fangalanes » (« celui qui a payé son impôt »), construit à l’initiative de Gallieni, en 1895, pour relier les différentes portions de rivières sur toute la côte sud-est. Plutôt que d’envoyer les malgaches qui ne pouvaient pas payer leurs impôts en prison, Gallieni avait eu la brillante idée de les condamner à 30 jours de travaux forcés. C’est grâce à cette main d’œuvre gratuite que le canal, mais aussi de nombreuses routes, la voie ferrée reliant Manakar à Fianarantsoa, et maintes infrastructures ont été construites. « Ah ! La colonisation, c’était le bon vieux temps !», nous dit Ignace ! Le pays marchait, à l’époque. Il y avait des vermifuges pour les enfants, des écoles. Depuis, tout a été fait de travers. Il nous le dit, c’était la belle époque !

Nous déjeunons au trou du commissaire, un endroit où nous pouvons nous baigner dans l’océan à l’abri des requins grâce à une barrière de récifs. L’eau est chaude, le courant très fort. Je sus déportée vers un groupe de touristes malgaches, une dizaine de femmes. Je sors de l’eau, elles m’alpaguent : « Photo, Vazaha ! ». Là, chacune défile pour prendre une photo avec moi. Elles sont toutes mortes de rire. Ben quoi, je sais que mon bronzage laisse à désirer, mais c’est pas une raison pour immortaliser le ridicule !!!

Le déjeuner est servi : rhum arrangé à l’ananas, salade de pâtes, Georgette et riz, ananas, banae. Miam, parfait ! J’achète de la vanille, à 9000 Ar au lieu de 10 000 (la pro de la négo en action), puis nous retournons par la plage jusqu’à la pirogue, seuls avec Ignace (Julia et Maxime sont restés se faire égorgés à La Vanille).

Le retour est paisible, plus direct. Ignace nous explique qu’il y a encore 10 ans, ces plages étaient couverte de végétation luxuriante, il y avait encore des lémuriens. Sans point de comparaison, le paysage est encore magnifique pour nous. Mais il nous dit qu’à ce rythme, dans 10 ans, il n’y aura plus de forêt à Mada. C’est désolant !

Sur le retour, nous bombardons de photos. Le cadre est splendide, surtout au soleil couchant. Nous découvrirons plus tard qu’elles ont toutes été prises en Iso 1 600 (= beaucoup de bruit, donc ratées, en langage non expert). Mais le paparazzi n’est pas parfait ! Tant pis, on a plein de belles images en tête.
Nous nous séparons d’Ignace à la porte de l’hôtel. Il a tenu à nous accompagner jusqu’au bout, c’est le devoir d’un VRAI guifr. Ah ! Ignace, tes trois femmes, 12 enfants, ta nostalgie de la colonisation, tes visites de TOUT TOUT TOUT… On ne regrette pas la rencontre !

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